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Robe grise
Pareille à la roche grise,Je touche des bouts d’éternitéDu bout de mes ongles brillants.Le sable est ma seule défense,La roche ma seule confidenteMuette mais tellement solide,Silencieuse mais digne de confiance.Je suis changeanteElle ne l’est pasSauf quand l’océan s’en mêleEt là nous nous ressemblons tant.La forêt comme abri
Quand la lumière du matin s’alourdit de givreTu marches vers la montagne de souvenirsLourds à porter, longs à déporter.Et tu deviens l’homme des bois solitaire et grand,Portant le merlin, le coin, le levier d’abattage,Pour décrypter ce que Brocéliande cache en son centre.Tu prévois où l’arbre va tomber, va s’évanouir,Les arbres voisins ne trembleront pas face au débardage.Des bardes dans la forêt il y en avait secrètementCaressant la sève de toutes les moiteurs des arbres sacrés.Tu guettes l’équilibre entre le houppier et la courbureSauras tu lire mon écorce, mes racines et mes bourgeons ?Sauras tu ébrancher mon âme si je lâche prise ?Tu tournes en rond, tu tournes en rond sous la cimeTu redeviens un animal profond et sans masque.La liberté est inscrite dans les feuilles que tu frôlesMais l’homme a besoin d’espace et de lumièreTe réfugier dans les hanches de la forêt mèreC’est te cacher loup blanc sous ses branches.Tu es libre et sans attaches sauf celle de la solitudeQui s’accroche comme une vieille souche trop solide.Continue à traîner la grume, l’agrume-soleil.Aller dans la forêt sans limitesC’est l’amour hors-la-loi.Et je pense t’y rejoindre dans ce voyageAu cœur de la terre végétale et ancrée.Abattre des arbres pour NoéC’était donner naissance à des clairièresEt accéder à la vision du ciel bleuZébré de grives musiciennes.Perds-moi aussi dans la forêt envoûtéeA l’abri du regard des renards.Transforme moi en animal plus sauvageA découvert même si j’en ai peur.Tu fais tomber les arbresCar ils sont plus grands que toi.Tu embrasses l’air frais, la montagne et le boisToi le jeune homme seul qui rencontre le monde.C’est parce que tu es déraciné que tu vis dans la forêt,Sache que c’est dans l’amour qu’on prend racine.La lune en commun
Ce soir je conduis seuleLa route à perte de vueCe soir tu penses seulDéroute et perte de vieDans nos nuits de ciment.Je regarde la lune argileElle me fascine de sa lumièreAu même moment sans douteElle liquide cette même lumièreSur tes épaules solidesEt sur tes cheveux qui volent.Je me dis secrètementLa lune nous regardeDe la même façon ce soirToi au milieu des montagnesMoi au milieu des immeublesTous les deux dans la vallée des larmes.Elle me murmure que de là-hautElle t’observe et te trouve magnifiqueElle me raconte que tu as le même œil qu’elleLumineux, mystérieux et calme.Nous sommes sans doute dans la pénombreMais nous avons la lune en commun.A chaque pleine lune, viens marcher proche de moiEn levant les yeux au ciel avec émotion,Je resterai silencieuse pour écouter ton regard.À demi urbaine
Rue étroiteSoleil athlétiqueEn proie aux nuéesTalons hautsPour marcher droitVisage portuaireParoles parfuméesSang chaud, sanglots,Sang interditElle pleure pauvre demoiselleAmante du macadamErrance de l’asphalteNue écrue, nue et crueNuits écrites, nuits et crisElle pleure pauvre demoiselleSes larmes se perdentDans les caniveaux moqueursRue étroiteVie étriquée et jaunie.Solo solaire
Ce matin de promesseJe me sens immigréeExilée, immoléeDans ce monde immonde.J’arrose mes coquelicotsQui poussent vaillammentSur le macadam de ma rue.HeureusementJe comprends la langueDes oiseaux de passageEt souvent ils se posentSur une de mes épaulesEt me livrent des secretsAu creux de mon oreille.Je marche en soloUn béret sur la têteDes chaussettes jusqu’aux genouxEt j’espère qu’écouter la merApaisera les hommes meurtris.J’offrirai au monde immondeMes petits coquelicots.
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