L’animal témoin, par Guy Braun
21 septembre 2016
Au cinéma comme dans les représentations graphiques, il est fréquent que l’animal soit témoin d’une scène. Il ne perd pas son animalité comme dans les fables ou dans les nouvelles qui l’humanisent. Il témoigne, par son regard ou par ses mimiques, des intentions de l’auteur comme pour une sorte de clin d’œil au spectateur. Je songe ici surtout à certains films.
Dans Le troisième homme de Carol Reed (1949), le chat révèle la présence d’Orson Welles et de ce fait, marque l’ambiguïté du personnage.
Le chat encore, dans le roman de Georges Simenon adapté par Pierre-Granier Deferre (1971), devient trait d’union d’un couple qui se détruit. Dans Au hasard Balthazar de Bresson, l’âne Balthazar porte la misère du monde dans ses yeux. Il prend des allures bibliques et, comme le bon pasteur, rassemble les brebis.
Dans tous ses films, et plus précisément dans Mon oncle, les chiens servent d’éclaireurs à Jacques Tati. Ils nous guident comme le font les chiens d’aveugle. Les oiseaux d’Alfred Hitchcock opèrent un renversement de la domination. Comme un vêtement que l’on enfilerait à l’envers.
La liste serait trop longue à énumérer ; terminons par le genre documentaire. Dans Zoo de Bert Haanstra (1963), c’est l’animal qui tient la caméra dans la mesure où les prises de vue sont orientées de l’animal vers le spectateur. Dans cette mise en scène, les humains singent (sic) les mimiques des animaux.
On pense alors à toute l’imagerie zoomorphe de la Renaissance et du XIXème siècle, les caractères étant dépeints par les particularités animales. De Giambattista Della Porta : « Aristote en sa physionomie, dit que ceux qui ont la tête en pointe, sont éhontés & tiennent du naturel des oiseaux qui ont de grands ongles, à savoir les corbeaux et les cailles, qui sont impudents et ont la tête en pointe » (Physio.15 p. 88), en passant par Charles Lebrun, et bien sûr Chardin.
Et puis, il y la star du jardin des plantes, Nénette, qu’interviewa Nicolas Philibert (2010).
Du mythe de Remus et Romulus en passant par le roman de Kipling, l’homme-animal questionne les origines. Mais c’est au travers des travaux sur les enfants sauvages que le mythe devient un réel sujet d’études. On se souvient des écrits du Professeur Itard à propos (1798) de Victor de l’Aveyron, relatés par Lucien Malson dans son livre Les enfants sauvages (1964), ainsi que du succès du film réalisé par François Truffaut en 1970. Mais on se rappellera aussi que Victor fut exposé aux regards curieux de la bourgeoisie parisienne de l’époque, et l’on comprendra que depuis l’Antiquité jusqu’au début du XXème siècle, les zoos humains révèlent l’angoisse et la curiosité qui s’attache à l’altérité radicale.
A ce sujet il existe un remarquable documentaire de David Teyssandier diffusé sur arte en 2005 que l’on peut revoir sur dailymotion.
Chroniques de l'insolite - Les enfants sauvages...
par Introcrate
http://www.dailymotion.com/video/xdkvg6_chroniques-de-l-insolite-les-enfant_news