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Claudia Azzola, poèmes

26 septembre 2011

par Claudia Azzola

Insonnia et autres poèmes

traduits par Sabine Huynh

Insonnia

A volte muoio nel mezzo delle vite
a volte troppo silenzio m’inchioda.
Una parola scivola nel corpo.
Accanimento del pensiero buca il sonno.
Inadeguatezza alla cosa virtuale :
la mia scrittura è inchiostro puro.
Troppa carne a cena, troppe parole,
accumulo di grassi nel sangue
e via con le magagne notturne.
Sapendo che fino all’ultimo e sempre
ci sarà in ogni ambito il sonno,
si vergherà scrittura naturale.

Insomnie

Il arrive que je meure en pleine vie
que trop de silence me rive.
Un mot s’immisce dans le corps.
La pensée obstinée transperce le sommeil.
Inadaptée au numérique
mon écriture est jet d’encre.
Trop de viande au dîner, trop de paroles
accumulation de graisse dans le sang
et s’ensuivent les misères nocturnes.
Sachant que jusqu’à la fin
le sommeil toujours apaisera l’humanité
l’écriture se fera naturellement à la main.

***

Noi che eravamo profeti

I corpi che amavamo li amiamo
anche nella assoluta magrezza,
la magrezza un affronto alla madre ;
non avere il peso,
solo presenza destituita
di giurisprudenza, pesare meno
della caratura dell’uccello
che trasvolta in stormi fedeli.
Il cuore si svergina
nell’oltrepassare quella soglia.
Essere sordi allo scrosciare d’acque,
una sensibilità sempre scoperta
anche quando ce ne siamo andati
da celle rozze tra estranei,
noi che eravamo profeti di natura.
Il gigante stringe a sé due uova
e poi due pulcini, scorre giù
per le clavicole sporgenti
magma di sangue e materia,
nel freddo sottozero ;
la vescica si coagula in pietrine,
negata la libertà di morire
passando dal tempio, il padre nudo
davanti alla figlia, maledizione
per noi, padre figlia, figlio madre,
messa a verbale una vita intera
nello svanire di lievi lievi pesi
nel freddo tempo.

Il poema incessante, Testuale, 2007.

Nous qui étions prophètes

Les corps que nous aimions nous les aimons
aussi dans leur maigreur absolue,
cette maigreur qui insulte la mère ;
ne pas avoir de poids,
sinon celui d’une présence destituée
de jurisprudence, peser moins
que le squelette des oiseaux
qui survolent en flopées soudées.
Le cœur se déflore
au-delà de ce seuil.
Être sourd au grondement des eaux,
une sensibilité toujours à fleur de peau,
même quand nous avons quitté
les cellules grossières, sommes devenus étrangers,
nous qui, par nature, étions des prophètes.
Le géant broie deux œufs
puis deux poussins,
les clavicules transpercent,
magma de sang et de matière.
Dans le gel, la vessie durcit,
silex,
est niée la liberté
de mourir.
Passant par le temple, le père nu
sous les yeux de sa fille, malédiction
pour nous, père fille, fils mère,
mise en mots, une vie entière,
dans le décharnement des corps si légers
dans le froid.

***

Le donne sono stanche

Le donne sono stanche :
sono abitate da amore
tigre che insegue, che viola foreste.
Le donne sono state via millenni.
Il sangue se lo sono formato
goccia a goccia anno su anno,
il ventre se lo sono portato
con sapere d’affetto e affanno.
Sazia di umori, abitata da amore
bello come un mondo nuovo
caduto ai tuoi piedi.

Les femmes sont lasses

Les femmes sont lasses :
l’amour les habite
ce tigre profanateur de forêts, qui tourmente.
À travers les millénaires elles s’en sont allées.
Leur sang elles ont distillé
goutte après goutte, année après année
leur ventre elles ont porté
avec sagesse, la main tendre, le front soucieux.
Repue d’humeurs, habitée par l’amour
aussi beau qu’un monde nouveau
tombé à tes pieds.

***

Storie di ragazze

Storie di ragazze. I padri sorvegliavano.
Che sapevano i padri delle figlie,
donne dal tempo del piccolo corpo,
ci siamo di nuovo partorite
donne. Una fece l’aborto,
cambiò il modo di parlare,
una donna grande, sentivamo,
un individuo originale...
Il padre ha oggi cent’anni,
ha compreso delle cose, non quella.
Chi nasce con un grumo
il piede pesante alla radice,
non c’è nessun libero arbitrio,
solo lottare contro il sole nero,
chiedere voce, corpo, corpo sottile,
per non essere confusa al mondo,
e cercare catene nuove,
e a essere, donna, insostanziale.

Histoires de filles

Histoires de filles.
Les pères surveillaient.
Que savaient les pères
de leurs filles
femmes du temps au corps menu
qui s’enfantaient elles-mêmes.
L’une se fit avorter
changea sa façon de parler
nous la voyions
comme une femme adulte
un individu original...
Le père a cent ans aujourd’hui
il a compris bien des choses
mais pas celle-là.
Pour qui naît avec un caillot
le pied lourd sur les racines
il n’y a aucun libre arbitre
seule une lutte contre le soleil noir
un vœu de voix, de corps, corps mince
pour ne pas être égarée
dans le monde et chercher
des chaînes neuves
être
femme
négligeable.


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