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Ancrage dans le présent - Souppes-sur-Loing

22 septembre 2014

par Guy Braun

Vernissage.

L’association Art puissance 7 events animée vigoureusement par Maïté et Gérard Robin organisait une très belle et instructive exposition de gravure en juin dernier à Souppes-sur-Loing. « L’ancrage dans le présent » relevait le défi de présenter grâce à dix artistes la diversité des techniques au service d’une richesse de réalisations très personnelles. En effet, la gravure est bien trop souvent associée au passé et à un art mineur de reproduction. Ceux qui ne perçoivent que des images ou pire encore des « visuels », auront bien du mal à comprendre la subtilité des traits, des tons, des pénombres que seule l’estampe est capable d’engendrer. Les artistes furent donc choisis pour mettre en valeur l’ensemble des expressions modernes de l’estampe.

Ainsi, Jean-Baptiste Colcher (voir l’entretien dans ce numéro) sculpte d’imposants papiers chiffons à l’aide de couleurs franches et lumineuses. On a l’impression (sic) de sentir la fraîcheur du papier humide sur la corde à sécher. Hélène Damville travaille la gravure sur bois au travers d’un univers noueux et dynamique ; elle suspend parfois ses grands tirages contrastés qui par transparence laissent filtrer une lumière douce dans le balancement léger du papier. Pierre Delvincourt, le graveur dans la nuit, tant il aime à travailler lorsque le monde est endormi, pratique une technique pointilliste très rigoureuse pour monter et descendre des univers d’où surgissent des références aux maîtres du passé. Les drôles de bonshommes d’Yves Jobert semblent saisis, déséquilibrés dans leur course qui les mène hors du cadre du papier. Ici la virtuosité du burin, traits francs et rigoureux, trame une vision de gris et de noirs où l’on sent tout le plaisir que procure le geste de l’outil d’acier froid tranchant la chaleur le cuivre rouge. Avec Kayoko Konomi, la fraîcheur des couleurs s’associe à l’univers des poupées et des contes de fée. Tout ce petit monde flotte dans l’eau-forte des rêves. Jean-Michel Mathieu-Marie est un maître de la pointe sèche ; il offre sa vision bleu de Prusse d’un monde d’architectures et de formes qui font penser à des cathédrales englouties. Son travail sur les rehauts de blancs implique une double impression et le choix d’un papier sombre ajoute encore au mystère. Très étonnante est la technique de Dominique Moindraut.

Démonstration

Elle utilise le carton comme matrice de tirages multiples volontairement limités ; ici le cutter et la superposition des couleurs imposent de forts contrastes où dominent des rouges flamboyants. Isabelle Panaud nous emmène, à sa manière, dans le monde des oiseaux. Ils semblent passés là comme imprimés dans l’instant, certains paraissent fossilisés dans la matrice, d’autres endormis sur la branche. Par ses couleurs qui hésitent entre pastel et aquarelle, l’univers de Dominique Van-der-Veken est aquatique. La douceur des camaïeux s’associe aux transparences des tons chauds, si bien que comme les gravures sont souvent tirées sans marges, seuls les connaisseurs savent reconnaître au travers de la subtilité des encrages à la poupée qu’il s’agit bien là d’une estampe. Pour ma part, j’exposais une série de manières noires qui restent une énigme pour le profane. Très proche de la photo, pour certains, elle s’en distingue par le velouté des noirs que seule le grainage du cuivre permet. Caresses inquiétantes ou tendresse de la pénombre.

Remercions encore une fois Maïté Robin qui fit, pendant toute la durée de l’exposition, des démonstrations de tirages pour le plaisir des visiteurs curieux de comprendre comment on pouvait rendre ainsi le papier amoureux de l’encre.

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Jean-Baptiste Colcher
Jean-Baptiste Colcher

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