Poèmes
1er février 2006
Attente de l’instant, oui attenteavec des mots qui tremblentdes souvenirs qui brûlentattente de ce retour sur la pierre du seuilen même temps qu’une respirationet l’ultime odeur de l’hiverC’est le printemps, c’est le retouret j’attends le premier grincement du voletl’éclat d’une flamme dans la cheminéela lampe au cœur de la piècequi caresse la nappe aux carreaux rougesEt tout rapidement s’enchaîne
Le goût de l’oiseaule soleil puis la pluie qui piquele tonnerre qui rouleAttendre aussi le goût de l’herbe autour du cœurle vent qui siffleet le pin qui tout seul chanteAttendre la trace dans la roséeà travers le pré ouvertcomme un livre frais, un livre vertpour toutes les germinationsAttendre toutes ces secondes brillantes comme des sèvesurgentes comme des battementset le pain rond, noirsur la tableavec le vin de Haute Serredans la lumière heureuse qui filtre à travers les feuilles de vignela saveur du premier repasCes instants dévoréssavourésretenus par l’herbe vigoureusequi s’étale partoutpeau piquetée de fleurstoute entière à son écoute, silencieuseavec de petites orchidées ondulanteset les grands éclats de la beauté
Se réhabituer à l’ombre à la clarté qu’il faut à chaque instant traverser, ces espaces à habiter, ces recoins où les araignées ont tissé leur nid, franchir les barrières de givre et de gelSe réhabituer à l’ombre, à la clarté, à la frontière des deux que l’on franchit allègrementau chant de l’oiseauet à son ramageà faire son nid au fond du cœurIl y a le dedans et le dehors mais où allerselon le désir ?
Le pollen va et vient lui aussipareil à un papillonse loge au plus secrets’éloigne sans regret vers l’oréeet embrasse au passage une fleur, une araignéeva plus loin comme certain de sa destinationLe pinlui aussi au moindre souffle de ventse répand au hasard dans la prairie
L’orage venu d’ouestcomme d’habitudea grondé toute la nuitet au matintout est oubliéSeule une petite feuille de vignegarde une goutte lumineuse sur sa dentelure
Le pays tout entier chante le petit bonheur du matinles chemins sont luxuriantsles forêts somptueuses et souplesdébordantes, abondantesprêtes à tout donnervraiment à tout donnerOn est soudain ensauvagé à force de copulationsC’est le pays tout entier qui chantele petit bonheur du matin
L’arbre se tait soudainil retient désormais son pollen il calme l’oiseauapprofondit le nidlaisse les traces transparentesIl suit dans le ciel les nuages qui se chevauchenten attente d’on ne sait quoipeut-être le goût de la pluiecomme une destinée, comme un amourdans le ciel rouge qui crépite et la forêt au loin qui soupireMais soupire-t-elle vraiment ?